Toutes les formes sont dans la nature, ou devrait-on dire toutes les belles formes sont dans la nature - mais est-il encore permis de parler du "beau", nous y reviendrons. Quelles proportions plus parfaites que celles offertes par la nature. L’architecture vernaculaire présente également cette forme d’évidence, et éveille à presque toute sensibilité ce sentiment d’agréables proportions, de présence logique, d’une inscription naturelle dans le paysage. Pourquoi, les architectures contemporaines caractéristiques du capitalisme effréné ne s’inscrivent-elles pas aussi bien dans le paysage ? L’architecture produite trop vite, les milliers de m² de logements produits chaque année, ne semblent pas recréer cette évidence. Et pourtant les bâtiments sont bien aussi présents dans le paysage. Ils sont au contraire plus réfléchis, prennent en compte un certains nombre de paramètres très savants visant à respecter leur environnement bâti et non bâti, intègrent des calculs très complexes pour réduire leur impacte sur la planète, mettent en œuvre des matériaux innovants et isolants afin de devenir des bâtiments ultra-performants et basse consommation.
Longtemps négligé, le paysage de nos villes et villages est aujourd’hui à reconsidérer tel qu'il est. Porteur de sens et d’identité, le contexte existant révèle parfois bien des richesses. Les premières ressources à considérer commencent ainsi par ce que l’on nomme le « déjà-là ». Les qualités intrinsèques d’une ville sont parfois ignorées, et les nouveaux projets, aménagements, nouveaux quartiers, fleurissent en voulant offrir un renouveau à un contexte qui est bien souvent porteur en lui-même de qualités attendant d’être révélées. La morphologie d’une ville est très importante. La composition urbaine, les différents types d’architectures présentes, la densité, les couleurs, les matériaux, forment une palette de base ouvrant diverses perspectives d’évolution pour l’avenir. L’identité d’une ville est l’une de ses premières richesses. Parfois cachée, il suffit de la révéler, de la mettre en valeur. Elle est porteuse également de son développement et peut être un support pour les nombreux projets de toute sorte à venir. Il s’agit également de considérer le vide et ses proportions. Berlin est par exemple une ville fortement caractérisée par le vide, et dont les vides ont une histoire. Le déjà-là peut en effet être lourd de sens, se rattacher à un passé peu glorieux que l’on préférerait oublier. Pourtant, l’exemple de Berlin montre que cette considération de l’existant, dans ses cicatrices, permet à une ville d’évoluer positivement. Le vide au milieu de la ville, apparaissant soudain au visiteur, comme une des qualités de cette ville. Le vide est devenu une identité. C’est la trace du passé meurtri de cette ville aux multiples couches historiques et douloureuses qui ont fortement marqué son tissu urbain. Considérer le déjà-là, c’est également prendre en compte la richesse des activités, des commerces et des équipements présents sur un territoire. C’est en évaluant leur qualité, leur utilisation, leur diversité. La simple révélation et mise en cohérence au sein d’une structure mieux organisée peut permettre à une ville de mieux faire fonctionner ses équipements déjà présents. La prise en compte de toutes ses richesses, leur recherche, jusqu’au détail le plus insignifiant – un terrain de pétanque est également un équipement – permet d’offrir à un territoire un autre visage. Le simple fait de lui révéler cette richesse lui permet de lui redonner un dynamisme. C’est en considérant ce que l’on a déjà que l’on voit également mieux ce qu’il nous manque ou pas. Le déjà-là, c’est également considérer les ressources d’un territoire. Que ce soit des ressources humaines, ou des ressources plus matérielles, comme les éléments composant le paysage, les espèces locales, ou encore les matériaux de construction locaux et historiques. Cette observation permet de dégager par la suite des pistes de projet qui rentrent en accord avec leur territoire et rejoignent par là une démarche territorialisée. Cette démarche de considération d’un existant déjà-là, déjà structuré, permet de révéler de « nouvelles richesses » pour reprendre le titre du pavillon français de la 15ème Biennale d’architecture de Venise. Dans leur manifeste les commissaires en exposaient plus précisément le propos : « Nous ne croyons pas au vertige de la concurrence des territoires, nous croyons au contraire qu’il y a partout d’immenses ressources, des complémentarités, des valeurs latentes à mobiliser, révéler, fertiliser. »[1] [1]https://issuu.com/librarielemoniteur/docs/nouvelles_richesses |